L'EXHUMATION AUX CARMES


En 1866, est décidé le percement de la rue de Rennes, dont le tracé passe au travers du jardin des Carmes et nécessite la destruction de la chapelle des martyrs et du puits dans lequel ont été jetés une partie des victimes du 2 septembre. L'archevêché veut sauver les ossements des prêtres martyrs. Le 20 mai 1867, la croix qui recouvre le puits est enlevée et le puits ouvert. On n'y trouve que des os de bœuf, de veau, de mouton et de poulet. Les frères Drouillard, chargés des fouilles, les font donc arrêter et recherchent l'existence éventuelle d'un autre puits dans le jardin. Sur des plans, ils trouvent, à proximité d'un bassin rectangulaire, un autre puits dont il ne subsiste aucune trace visible. Le 23 mai, ils ouvrent une nouvelle fouille de recherche et découvrent le parement extérieur d'un puits comblé et voûté. La voûte est recouverte d'une couche végétale de 40 cm d'épaisseur. La voûte étant démolie, les terrassiers trouvent un puits de 1,80 m. de diamètre. A 1,50 m. en dessous de la voûte, débouche un petit tuyau de plomb permettant de vidanger le bassin. 30 cm. plus bas une couche de terre végétale pure. Cette couche de terre enlevée fait apparaître une couche de 30 cm. d'ossements sur un lit de chaux de 20 cm. d'épaisseur. Sous le lit de chaux les fouilles font apparaître des ossements sur 2 m. mélangés à une substance brune. Sous les ossements un remblai de sable et cailloux contenant des débris divers dont une tête d'arbre cassée formant un rameau de 1 m., de la vaisselle grossière à la marque des pères carmes, des os de bœuf, de mouton et de poulet, des bouteilles, une lame de couteau des manches de pelle, et « 2 bêches très oxydées et couvertes de fortes agglomérations composées de débris divers dans une masse qui nous parait être en partie du sang coagulé. » En dessous de ce remblai une couche de 40 cm. de fumier presque pur, puis 3,80 m. de terre végétale dans laquelle se trouve de petits ossements, et des débris divers. Le 20 juin, alors que les travaux se terminent, un homme âgé qui ne se fait pas connaître déclare à un ouvrier du chantier que le puits une fois rempli plusieurs corps qui n'avaient pu y trouver place avaient été inhumés dans le voisinage ; il désigne le dessous des marches qui descendaient de la rue d'Assas. Le perron est démoli et les fouilles entreprises ne donnent rien. Le 25 juillet des ouvriers creusant une tranchée pour les fondations d'un mur mettent à jour un crâne : il s'agit d'une fosse de 2 m. de long sur 1 m. de large et 1,50 m. de profondeur appuyée au puits. Dans cette fosse une couche de 70 cm. d'ossements en désordre sous une couche de chaux de 20 cm. recouverte de 60 cm. de terre végétale. Tous les ossements retirés ont été examinés par des médecins qui ont pu déterminer :

Pour ceux du puits
1 - Que le nombre des sujets dont nous avons les restes s'élève à 90 environ ;
2 - Que sur ces sujets 2 au moins appartiennent au sexe féminin (20 à 25 ans) ;
3 - Que 3 au moins étaient des enfants ;
4 - Que 24 de ces sujets portent des traces de blessures qui doivent faire croire qu'ils ont succombé à une mort violente ;
5 - Que si une certaine quantité d'ossements retirés d'un cimetière ont été jetés dans le puits, néanmoins la plus grande partie de ce que nous y trouvons vient de corps qui y ont été déposés entiers, et qu'ainsi l'examen de ces restes confirme la tradition rapportant qu'un certain nombre des victimes des massacres du 2 septembre 1792 ont été ensevelis dans le puits.

Ossuaire

Pour ceux extraits de la tranchée
1 - Que ces restes appartiennent à 9 individus ;
2 - Que sur ces 9 individus, 6 seulement ont été enterrés avec leurs chairs ;
3 - Que parmi ces derniers, 1 porte la trace de violences auxquelles il a pu succomber ;
4 - Qu'il est ainsi probable que ces derniers ossements appartiennent aussi à des victimes des massacres du 2 septembre 1792.

Tous les ossements et les débris divers ont été déposés dans la crypte de la chapelle spécialement aménagée pour les recevoir.